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Les mines de Potosí, Sucre & Torotoro

Je continue la remontée vers le nord sur l’Altiplano et son assommante altitude. D’Uyuni à La Paz, j’irai découvrir les villes de Potosí et de Sucre puis le parc national de Torotoro, au sud de Cochabamba. Mines, villes coloniales, géologie, spéléo et paléontologie au programme ! Et beaucoup de migraines !

Voilà plus d’une semaine que je dors à des altitudes supérieures à 2500 m, et que je passe mes journées à des altitudes entre 2500 et 5000 m. Affaibli par un petit rhume (que je traine depuis le road-trip en Argentine à cause de la climatisation), le mal des montagnes me gagne finalement. Et c’est particulièrement fatigué et fébrile que je continue ma remontée jusqu’à La Paz, la capitale de la Bolivie. Un rien ne m’essouffle, de fortes migraines m’attaquent la journée et au réveil, j’ai la bouche sèche non stop, je suis épuisé et j’ai même de la fièvre par moments. Bref, rien de très agréable. Au moment où j’écris ces lignes, une semaine plus tard, je ressens toujours les mêmes symptômes.

map uyuni to la pazLe mardi 6 octobre, nous rentrons de notre excursion au Salar d’Uyuni en milieu d’après-midi. Après les au revoir au reste du groupe, Chafiha et moi décidons de continuer l’aventure ensemble et de monter jusqu’à Potosí le soir même. A peine arrivé au terminal de bus, nous montons dans un bus sur le départ, et nous sommes partis pour 3h de bus jusqu’à Potosí. Nous arrivons de nuit autour des 20h. Après pas mal de déambulations, on trouvera un hôtel près du terminal pour la nuit. On se fait un petit resto et on rentre se coucher. Potosí culmine à plus de 4000 m, voire plus selon où l’on se trouve dans cette ville en pente. Je suis claqué, littéralement.

Le lendemain, nous allons faire un tour du centre-ville le matin, et nous trouvons une agence pour faire le tour des mines du Cerro Rico l’après-midi. Car Potosí c’est la ville qui a fait la richesse de l’empire colonial espagnol grâce à ses mines d’argent. Encore en fonctionnement, on y trouve surtout du zinc et de l’étain. Certains verront cela comme du voyeurisme, d’autres comme moi comme un moyen de prendre conscience de la réalité des choses, mais des tours s’organisent tous les jours pour pénétrer dans la mine, rencontrer les mineurs et constater leurs conditions de travail, guères différentes des mines de charbon du XIXe siècle en Europe. Avec le détail près que ces mines se trouvent à 4200 m au dessus du niveau de la mer, et que tout effort est rendu très difficile par l’altitude.

Equipés comme des mineurs, nous allons donc à la rencontre des vrais mineurs sur leur lieu de travail, et rentrons dans un petit tunnel pour en sortir que deux heures et demi plus tard. 2 kms parcourus à pied à travers des galeries infinies, glauques, pleines de poussière. Nous croiserons une vingtaine de mineurs, certains poussant des charriots pleins de roche jusqu’à la sortie, d’autres de retour d’une dure journée de travail. Il est d’usage de distribuer des cadeaux (boissons, feuilles de coca et parfois des bâtons de dynamite !) aux mineurs lorsqu’on nous les présente.

On apprend notamment que le travail des mineurs est tellement dur à cette altitude que tous consomment de l’alcool (je l’ai testé, c’est de l’alcool à 90°c !) et mâchent de la feuille de coca à longueur de journée. Les mineurs travaillent entre 8 et 10 heures par jour du lundi au samedi, et ne voient la lumière du jour qu’au moment d’évacuer les gravas qu’ils ont extraient. Ils sont payés une somme absolument ridicule compte tenu de la dureté et du risque encouru. Environ 10 euros par jour par les débutants, et le salaire augmente avec l’expérience et le rang. La dynamite et les outils nécessaires pour l’extraction des minéraux est à la charge des mineurs. La moindre des choses serait que les entreprises qui traitent les minéraux équipent les Hommes et les Femmes qui risquent leur vie tous les jours pour les extraire de la mine afin de leur assurer une sécurité minimale !

Par endroits, on ne voit pas à deux mètres dans la mine car un filon a été dynamité non loin. Nos masques sont saturés de poussière et de l’odeur de dynamite. Et les mineurs ne portent pas de masque ! Le bout du tunnel est une libération. 1h dans les mines m’aurait suffit personnellement. J’ai trouvé cette visite très intéressante. Cela fait réfléchir. Tout ça n’est vraiment pas juste. Ca fait mal au cœur de voir à quel point nos pays exploitent le reste du monde; de savoir que ces gens travaillent comme des acharnés pour une poignée de sous, tandis que les minéraux sont vendus surement bien plus chers en Europe… J’avais eu la même impression à Ijen et ses mines de souffre en Indonésie, bien que je n’avais pas rencontré de mineurs cette fois-là. Il faut le dire, la visite est assez dangereuse, car une mine n’est pas un terrain pour enfants, mais cela vaut la peine de la visiter.

Tout de suite après la visite, Chafiha et moi prenons un bus pour Sucre, à 4h et demi de Potosí. Je vais me coucher encore très fébrile, après cette journée très éprouvante physiquement. Le lendemain, nous passerons une partie de la journée ensemble à visiter le très joli centre-ville de Sucre, qui est la capitale constitutionnelle du pays. Et en milieu d’après-midi, nos chemins se séparent, encore… Chafiha continue vers Santa Cruz pour un jour avant de rentrer en France. Une très belle rencontre encore. Toujours trop court ! Mais de beaux souvenirs en tête…

Les trois prochains jours, je resterai en place pour me reposer et tenter de m’acclimater un peu. Sucre est à 2780 m d’altitude, ça devrait faire un bon premier pallier. J’en profite pour avancer sur le blog et je passe quasi l’essentiel de mon temps dans ma très sympathique pension, au centre de Sucre. Mais les migraines sont toujours aussi fortes, et l’énergie me manque. Sans doute le fait d’être toujours un peu malade n’aide-t-il pas vraiment, mais ça commence à faire long et je dois reprendre encore un peu la route.

Le dimanche 11 octobre, je prends un bus de nuit pour Cochabamba à 330 kms de Sucre. 10 longues heures, avec un sommeil assez agité. J’arrive à 6h du matin au terminal de bus. Encore un petit bout de chemin pour rejoindre le parc national Torotoro, qui m’a amené ici. Torotoro est un parc fascinant pour sa géologie et ses fossiles marins et jurassiques. On peut y voir des empruntes très nettes de dinosaures, fossilisées. Je ne refuse jamais une occasion d’être transporté des millions d’années dans le passé…

Sur les indications trouvées ça et là, je me rends sur l’Avenue Republica en taxi et je trouve un stand de mini-bus pour Torotoro. Par pur hasard, quelques minutes plus tard, je tombe sur Alex, un américain qui travaillait à la réception de mon auberge à Buenos Aires, et avec qui j’avais sympathisé lors de mon séjour. Et il va aussi à Torotoro ! Le monde est tellement petit, et juste quand un compagnon de voyage continue sa route de son côté, un autre apparait pour partager un nouveau bout de chemin !

Petit souvenir d’Afrique, nous attendons une demi-heure que le mini-bus se remplisse (mais chacun aura sa place dans le mini-bus !). Et les cinq heures de route qui s’en suivent (pour 110 kms…) seront très mouvementées sur une route de galets, interrompues par quelques arrêts car les freins du véhicule ne fonctionnent pas. Quand on voit le paysage autour, ça fait un peu peur de savoir que les freins ne sont pas au top de leur forme… Nous arrivons tout de même sains et saufs vers 12h30.

L’après-midi, nous avons fait une très belle jolie ballade dans le canyon de Torotoro, avec deux suisses. Le clou de la balade : la cascade d’El Vergel au fond du canyon. On peut s’y baigner. Parti dans l’idée de faire un saut dans l’eau, mon corps m’arrêtera net après ces 2h de marche en descente dans le canyon. Je me sens pas bien du tout, et je sens que ce n’est pas une bonne idée de plonger. La remontée sur 1,5 kms en haut du canyon me cassera les reins. Et c’est complètement épuisé et fébrile quand j’arrive en haut. Je sers les dents et continue la visite, mais je ne vais pas très bien. Nous allons voir un magnifique point de vue sur le canyon. L’installation est sympa car on peut marcher au dessus du vide sur une plateforme qui laisse passer la lumière. Nous remontons vers le village ensuite, en nous arrêtant par quelques empruntes fossilisées de dinosaures. Mon état se détériore, et je ne prends plus aucun plaisir. D’autant que nous sommes en t-shirt, que la nuit tombe, et notre guide nous annonce qu’il reste une heure de marche jusqu’au village. Je me déconnecte de tout, et j’avance comme un robot avec pour seule envie d’aller me coucher en rentrant !

Heureusement, la nuit de sommeil portera ses fruits et, au matin, je me sentirai mieux. Je rejoins mes trois compères pour visiter la Ciudad de Itas et la Caverna de Umajalanta. A l’agence, nous tombons sur un sympathique groupe de sept français, tous venus en couple de leur côté, et un uruguayen. Tous avec la même envie, nous formons deux groupes de six pour aller visiter ces deux endroits. En 4×4, nous partons tout d’abord pour la Ciudad de los Itas, à plus de 3700 m d’altitude, puis nous faisons une balade de 3-4 heures. La visite est fabuleuse, les paysages à couper le souffle et les cavernes mystiques. Un petit instant méditation dans une caverne avec de la flute de pan nous transporte ailleurs le temps d’une chanson. Je suis encore très affecté par l’altitude, et le seul ! A l’arrière du groupe, j’avance tant bien que mal. Je me suis jamais senti aussi faible en rando, même au sommet du Kili à 5895 m ! On me donne un cachet, qui par magie fera tout disparaitre le reste de la journée… enfin tout sauf la difficulté de randonner à 3700 m. J’achèterai plus tard une boite de ce cachet pour faire un traitement complet.

L’après-midi, nous allons visiter la caverne de Umajalanta. Après les mines de Potosí, ce sera encore une petite aventure sous terre, cette fois-ci un peu plus ludique. Stalactites, stalagmites, couloirs serrés, lac sous-terrain et poissons aveugles, tout un défilé de paysages sous la terre. On aura bien rigolé, à ramper dans des passages parfois à peine suffisamment larges pour nos fesses. Digne d’une partie de twister sous la terre ! Le soir, nous irons tous manger ensemble avant de chacun partir de notre côté.

Mercredi 14 octobre, toujours en compagnie d’Alex, je quitte Torotoro et prend un bus à 6h du matin pour Cochabamba. Arrivé à 11h30, il faudra attendre 21h pour prendre mon bus de nuit pour La Paz. Nous retrouvons quatre des français rencontrés la veille au terminal en fin de journée. Alex et les français partent au sud, direction Sucre. Et moi j’embarque pour La Paz. Bye bye les nouveaux copains, l’aventure continue…

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