La remontée vers le nord commence… Je laisse l’Afrique du Sud derrière moi et rejoint la Namibie. C’est une étape phare de mon voyage, un pays que je rêve de visiter depuis des années et qui promet d’être l’une des plus belles expériences sur ce tour du monde. Au programme : road-trip de dix jours à travers le désert de Namibie et ses dunes de sable jusqu’à Fish River Canyon.
Je prends mon bus pour Windhoek le dimanche 21 juin matin à Cape Town. La traversée durera 20 heures. Le temps pour moi de terminer le deuxième tome des Hunger Games. On passe la frontière aux alentours des 21h, et cela prendra bien 2 heures. Entre contrôle des bagage aléatoires dans la confusion totale et distribution des passeports à la criée, après nous les avoir “confisqués” pendant 45 minutes, il n’y a de quoi trouver cela comique. Mais quelque chose me dit que ce passage de frontière était plutôt soft pour l’Afrique… Le trajet en Namibie se fait de nuit ; nous arrivons à Windhoek au petit matin, après une bonne nuit, bercés par les vibrations du bus.
J’ai rencontré par hasard un autre voyageur, Livaleni, originaire de Hollande, dans mon auberge quelques minutes avant de prendre un taxi pour la gare routière à Cape Town et il se trouve que l’on va au même endroit, par le même bus. On finira par louer une voiture et voyager ensemble pendant dix jours !
La Namibie est un pays immense qui ne compte que 2 millions d’habitants, ce qui en fait le deuxième pays le moins densément peuplé au monde, après la Mongolie. D’immenses déserts couvrent le pays, et il n’existe pas vraiment de transport en commun pour l’explorer. Louer une voiture était donc indispensable pour voir les points d’intérêt de la région.
A peine arrivé à Windhoek, la capitale de Namibie, Livaleni et moi partons à la recherche d’un véhicule pour commencer dès le lendemain un road-trip de dix jours. C’est une Citroën C1 que nous allons malmener sur les pistes du désert de Namib.
En l’espace de quelques heures, voilà mes prochains dix jours d’organisé ; nous n’avons pas perdu de temps. Et comme si tout avait été programmé dans mon sens, je suis contacté dans la soirée par email par Pedro, un portugais qui traverse l’Afrique en vélo depuis le Portugal, en réponse à une annonce que j’avais posé sur le forum du Lonely Planet quelques jours auparavant pour chercher des compagnons de voyage. On dine ensemble dans une brasserie allemande, et Pedro rejoint notre road-trip.
C’est donc à trois que nous prendrons la route le lendemain. On parcourra plus de 3200 km en 10 jours. L’itinéraire commence à Swakopmund à 380 km à l’ouest de Windhoek, sur la côte atlantique. C’est le début du désert de Namib, où une mer de sable s’étend sur plus de 10 km jusqu’à Walvis Bay, formant de hautes dunes de sable. Nous redescendrons ensuite jusqu’à Sossusvlei, en passant par Solitaire. D’autres dunes de sable, rouge cette fois-ci, et des salars nous y attendent, avec la plus haute dune au monde. Nous poursuivrons vers le sud jusqu’à Lüderitz pour visiter la ville fantôme de Kolmanskop, ensevelie par les sables du désert. Puis nous terminerons au sud-est par le Fish River Canyon, avant de remonter jusqu’à Windhoek par Keetmanshoop.
Le mardi 23 juin, le road-trip commence. On rejoignons Swakopmund en quatre heures par une piste. Il ne faut pas s’éloigner longtemps de Windhoek avant de trouver le désert. On ne croisera pas beaucoup de voitures sur cette route, un peu en dehors des sentiers battus, le tronçon étant doublé par une autoroute plus au nord. Nous choisissons de commencer le périple directement dans le désert. On apercevra cependant beaucoup d’animaux en route : springboks, orynx, kudus, zèbres et renards.
Swakopmund est une charmante petite ville sur la côte atlantique, avec pour barrière naturelle au sud et au nord d’immenses étendues de dunes de sable. On y vient généralement pour explorer les dunes et/ou faire des sports extrêmes. L’influence allemande à Swakopmund se voit très clairement dans l’architecture des bâtiments. Cela donne un mélange assez étonnant… Qui aurait pensé trouver un bout d’Allemagne sur la côte atlantique au milieu du désert de sable.
La Namibie est une ancienne colonie allemande, autrefois appelée German South-West Africa, au cours du XIXème siècle – début du XXème siècle. Sanction de la première guerre mondiale, la Namibie est perdue par l’Allemagne et cédée à l’Afrique du Sud, qui administrera le pays jusqu’à l’indépendance en 1990. Les influences allemandes sont donc toujours là (l’allemand est parlé un peu partout), même si le pays suit entièrement le modèle sud-africain désormais (anglais et afrikaans comme langue officielle, circulation à gauche, etc…).
Le lendemain, Livaleni et moi allons explorer les dunes de sable en quad. C’est un peu la seule façon de s’immerger complètement dans les dunes, la randonnée étant exclue. Marcher au cœur des dunes est exténuante… C’était ma première expérience de quad et j’ai beaucoup aimé les sensations que cela procure. Le terrain est idéal pour faire du quad ; on peut prendre très facilement de la vitesse en remontant les dunes. Deux bonnes heures durant, nous nous amuserons à dévaler les dunes, qui s’étendent à perte de vue.
On termine la matinée par une petite session de sand-boarding. Couché à plat ventre sur une vulgaire planche en bois, on se jette la tête la première du haut d’une dune et on dévale la pente à pleine vitesse jusqu’en bas. Pas de remontée mécanique malheureusement ; c’est à pied qu’il faut grimper à nouveau sur la dune. Trois descentes me suffiront, vu l’effort que demande la remontée.
L’après-midi, je fais l’ascension de la dune 7, la plus haute de la région côtière. Une tempête de sable commence au même moment, rendant la progression difficile. Près de la crête de la dune, le vent de sable souffle tellement fort qu’en quelques secondes je suis entièrement recouvert de sable, sable qui vient se loger un peu partout sur le corps (les yeux, la bouche, les oreilles…). Mais une fois en haut, tout se calme d’un coup. Le vent de sable s’arrête au niveau des genoux. Cela m’a rappelé le Sahara, c’était drôle.
Nous passons la soirée à Walvis Bay, où Pedro nous présente un ami namibien, d’origine portugaise. Et à notre grande surprise, ce dernier nous a réservé un appartement 4 pièces à ses frais ! Nous visitons ensemble la ville, connue pour son immense port de marchandise et pour sa baie artificielle où des milliers de flamants roses vivent à l’année. On est reçu comme des rois, invité au restaurant ; une très bonne soirée !
Le jeudi, nous prenons la route vers le sud, direction Sossusvlei. La route au milieu du désert jusqu’à Aus n’est pas goudronnée. La piste, la poussière et les vibrations font vivre quelques moments difficiles à notre petite C1, mais nous avançons à bonne allure. Nous traversons le Tropique du Capricorne, pour un peu plus loin trouver la seule “ville” avant Sossusvlei, qui s’appelle Solitaire. En réalité, il s’agit plus d’une station service qu’autre chose, mais il y a quand même 92 habitants !
Arriver à Solitaire est plutôt une chance puisque nous nous apercevons en faisant le plein que nous avons un pneu à plat. Et c’est précisément le seul endroit sur plusieurs centaines de kilomètres où l’on peut faire réparer sa voiture… Nous confions la C1 aux mécanos de la station, et en profitons pour préparer à manger. Pedro voyage avec un petit réchaud qui fonctionne au fuel, nous cuisinerons avec pendant tout le road-trip.
Nous reprenons la route un peu plus tard, et établissons notre campement au milieu de nulle part à une centaine de kilomètres de Sossusvlei. Première nuit dans le désert. Et elle s’annonce froide. Feu de camp, repas préparé sur les braises, sous le ciel étoilé ; du camping comme j’aime !
La journée suivante est consacrée à la visite du parc national de Sossusvlei. Nous pénétrons dans le parc national le matin, posons nos tentes et partons à la découverte de cet endroit unique au monde. Sossusvlei est un salar, entouré d’une mer de sable rouge, avec d’immenses étendues de dunes parmi les plus hautes du monde. Le désert de Namibie est le plus vieux au monde et il en aura fallu des millions d’années pour façonner ce site.
Une petite randonnée dans la Hidden Vlei nous donne un premier aperçu des dunes. Nous rejoignons ensuite le site de Sossusvlei à 5 km à pied du parking. Une route pour 4×4 permet de faire ce chemin, et un shuttle nous propose de nous y emmener, mais nous nous lançons à pied sur cette piste. Et je dois dire que c’était une grave erreur; la marche dans le sable étant exténuante et longue. Nous faisons une course contre la montre, voulant arriver à temps pour le coucher de soleil. Nous ne croisons pas âme qui vive sur le chemin, seulement des 4×4 qui repartent du site. Nous arrivons finalement pour le coucher au sommet d’une dune, en plein cœur de la Sossusvlei, en face de Big Mama, l’une des plus hautes dunes du parc. Le coucher est fantastique, le sable prend une couleur étonnante et nous avons ce sentiment d’être seuls au monde. Et nous le sommes littéralement, personne n’est venu jusqu’ici aussi tard. Nous regagnons le parking à pied dans le noir total, à la merci des prédateurs. Nous entendons des hyènes ricaner non loin et divers bruits inquiétants. Mais nous arrivons sain et sauf à la voiture.
On comprendra plus tard pourquoi nous croisons personne en route, puisque nous trouvons le portail du parc fermé une heure plus tard quand nous débarquons au campement. Nous sommes enfermés dans le parc depuis une heure ! On accepte de nous ouvrir, mais nous aurions apparemment jamais du rester aussi longtemps dans le parc. Nous sommes donc privilégiés car voir ce coucher de soleil en plein Sossusvlei est visiblement plutôt rare puisque fermé au grand public…
Le lendemain, nous continuons d’explorer le parc. Nous retournons à Sossusvlei, cette fois-ci acceptant de payer le shuttle. Hors de question pour nous de refaire ces 10 kms à pied ! Nous visitons cette fois-ci la Dead Vlei, et faisons l’ascension du Big Daddy, la plus haute dune du monde selon certaines sources, culminant à environ 350 mètres (la taille change régulièrement). La montée est très physique ; 45 minutes d’ascension, récompensée par une vue à 360° à couper le souffle… Cet endroit est incroyable ; un des plus extraordinaires que j’ai eu l’honneur de visiter. On se croirait littéralement sur une autre planète. Un bout de Mars au milieu de la Namibie…
On repart en fin de journée pour le sud. Nous avançons un maximum pour se rapprocher de Lüderitz où nous attend la prochaine étape. 4 heures de route plus tard nous nous arrêtons dans une guest farm près de Helmeringhausen. Nous continuons la route le lendemain jusqu’à Aus, l’un des seuls endroits au monde où l’on peut encore voir des chevaux sauvages. Nous en verrons plusieurs dizaines sur le chemin. Nous arrivons dans l’après-midi à Lüderitz, une ville encore très allemande au bord de l’Océan Atlantique. On est à 400 kms à vol d’oiseau au sud de Swakopmund. Nous passerons la soirée en auberge.
Lundi 29 juin, nous allons visiter le matin Kolmanskop, à 10 kms de Lüderitz. Il s’agit d’une ville fantôme, fondée au début du XXème siècle, autrefois habitée par les chercheurs de diamants puis abandonnée en 1958, et laissée aux sables du temps. Cet endroit est très singulier ; le mystère plane autour de cette ville, prestigieuse fût un temps, puis désertée en quelques années, à la découverte de plus gros diamants plus loin. Le désert a repris ses droits ; le sable s’est glissé partout dans les maisons abandonnées. Un petit paradis pour les amateurs de photos…
Nous reprenons la route en milieu de journée pour le Fish River Canyon. La route est longue, nous arrivons en fin de journée à Ais-Ais. On campe au bord de la route entre Ais-Ais et Hobas, l’entrée du parc.
Le lendemain, nous allons explorer le Fish River Canyon, une étape que j’attendais avec impatience. Je ne suis pas déçu; les paysages sont épiques. Les gorges s’étendent sur 90 kms et de nombreux points de vue permettent de profiter du paysage. C’est une version miniature du Grand Canyon. Un trek de cinq jours permet de traverser les gorges sur plus de 80 kms. J’aurais aimé le faire mais, par souci de timing, je me contenterai de les observer d’en haut. Nous rencontrons deux belges en 4×4 qui acceptent de nous amener avec eux pour visiter l’extrémité sud, accessible uniquement par une piste de 12 kms pour 4×4. C’est certainement l’endroit le plus beau du parc… Le coucher sur les gorges est magique
Le road-trip touche à sa fin ; nous reprenons la route vers le nord mercredi 1er juillet. Nous nous arrêtons en chemin à Keetmanshoop pour visiter la Quiver Tree Forest, une petite forêt d’aloès, et le Giants Playground, un étonnant labyrinthe naturel de roches empilées. Nous arriverons à Windhoek le lendemain.
Ce road-trip aura été un beau voyage, et la meilleure façon de découvrir la région. La compagnie de Livaleni et Pedro a été très agréable. Les sites que l’on a visité sont parmi les plus beaux que j’ai eu la chance de voir. Et certainement les plus dépaysants. Un petit mélange entre l’Outback australien et le Sahara.
Je n’ai pas de doute sur le fait que la Namibie fera partie des plus beaux souvenirs de ce voyage. Et j’ai hâte d’en voir plus… Un safari au nord du pays, dans le parc national de Etosha, m’attend.